Créer une forêt jardin, c’est chercher à reproduire l’écosystème des lisières de forêt ou des forêts juvéniles, mais en choisissant des espèces et des variétés d’arbres à notre convenance : arbres fruitiers, arbres à noix, arbres fixateurs d’azote pour faire pousser les autres, arbres ornementaux, arbres pour la biodiversité, …
Mais on ne s’arrête pas aux arbres. Comme dans les jeunes forêt, le soleil se fraie partout un chemin entre les jeunes arbres, ce qui permet de faire pousser encore au moins deux étages de plantes : l’étage des arbrisseaux (groseilles, mûres, noisetiers, etc.), et l’étage des légumes, de préférence des légumes vivaces ou qui se ressèment tous seuls pour qu’on n’ait pas à y revenir chaque année.
L’agriculture conventionnelle, héritière des agricultures du néolithique apparues il y a dix mille ans au Moyen-Orient, applique bêtement au monde entier un modèle inventé dans des écosystèmes de prairies semi-arides. Or les régions tempérées comme la France ne sont pas naturellement des régions de prairie. Quand on y laisse une parcelle en jachère plutôt que de dépenser des dizaines de litres de diesel à l’hectare pour lacérer la terre avec une charrue en saccageant sa structure et en massacrant sa faune, elle s’embroussaille en quelques années et devient forêt en dix ou vingt ans. Pendant cette période de forêt juvénile, la productivité végétale et la biodiversité sont spectaculaires. Puis à mesure que les espèces pionnières laissent peu à peu la place aux espèces dites climaciques, le rythme ralentit, et on aboutit après quelques siècles à une chênaie-hêtraie primaire culminant à 45 mètres. C’est la sylve des Gaulois que nos ancêtres ont déforestés au cours des grands défrichements du Moyen-Âge.
Si l’on veut éviter de dépenser sans cesse du temps et de l’énergie, il serait temps de se demander comment tirer parti de la succession naturelle plutôt que de la contrecarrer.
Principes de permaculture en montagne. Morvan - France.
Une véritable utopie (en Belgique) :
La Ferme du Bec Hellouin
Le principe de création d'une forêt nourricière
Le principe de création d'une forêt nourricière
L'idée est d'observer la nature et d'imiter la façon dont elle recrée une forêt à partir d'un sol mis à nu. Il est nécessaire de prêter attention à la taille des arbres que l'on va mettre côte à côte mais aussi à leur remplacement et donc à leur succession dans le temps. Les premières plantes qui colonisent un sol dégradé sont dites « pionnières ». C'est elles qui réparent les carences, améliorent la structure et enrichissent le sol. Leur vitesse de croissance est élevée. Elles font généralement partie de la famille des légumineuses et sont capables de fixer l'azote atmosphérique grâce à une symbiose avec une bactérie. La démonstration suivante est une simplification de ce qui se passe dans la nature, l'objectif est de mieux comprendre la notion de succession. Il y a donc ici un élément qui joue un rôle important : le temps. Il ne s'agit pas seulement d'une technique mais aussi d'une stratégie.
1. Le couvre sol afin de commencer à protéger la terre. En général, une légumineuse est utilisée afin de commencer à fixer de l'azote dans le sol. Cette plante a une durée vie relativement courte, en général 6 mois, et représente la part de plantes la plus importante. Sur 1000m2, on en compte 100 000. En fin de cycle, il reste quelques plantes ici et là localisées sur les bordures.
2. L'étage inférieur (les espèces sélectionné feront de préférence partie de la famille des légumineuses) ces plantes représentent une part moins importante et vivent jusqu'à 4 ou 5 ans. Elles sont de court terme. On en compte 10 000 sur 1000m2. En fin de vie il reste une dizaine de spécimens.
3. L'étage intermédiaire. Ce sont des buissons qui fixent également de l'azote dans le sol. Ils sont moins nombreux. Ils représentent le moyen terme et vivent jusqu’à 10 à 15 ans. Cet étage représente 1000 individus pour 1000m2. A terme, il reste 100 ou 50 d'entre eux, et la plupart ont été utilisés comme mulch (paillage).
4. L'étage supérieur, des arbres fixant l'azote et qui restent en place jusqu'à la fin du cycle de la forêt, c'est donc le long terme. On compte ici 100 individus pour 1000m2. Lorsque la forêt est à maturité il en reste à peine une dizaine voire 5.
Ce que l'on peut produire dans la forêt nourricière
Ce que l'on peut produire dans la forêt nourricière
• fruits (pomme, poire, abricot, groseille, cassis, etc.) • noix et graines (châtaigne, amande, pois de Sibérie, etc.) • salades et aromatiques (stellaire, mauve, feuille de tilleul, ail des ours, etc.) • plante à savon (saponaire) • légumes (chénopode, chou maritime, artichaut) • plantes médicinales (eucalyptus, etc.) • champignons • épices (poivre du Sichuan, herbe à curry, benoîte, etc.) • bois de chauffage • vannerie sauvage (châtaigner, noisetier, bourdaine, etc.) • piquet et canne (bambou, noisetier, châtaigner, etc.) • miel (en disposant une ruche!) • etc.